Tôgbè Yéton, vrai acteur urbain ou simple phénomène de mode !!

Dans le milieu urbain, faire preuve de réactivité et avoir l’esprit de spectacle sont entre autres des atouts pour espérer se faire une place. Sur l’échiquier urbain béninois, le calme et l’ennui règnent les trois quarts du temps ; les réels impulsions pour faire vivre et créer de l’actualité restent rares ou sont pour la plupart de vulgaires feux de paille. C’est dans cet état de choses qu’est apparu le concept Tôgbè Yéton.

Le concept reste tout ce qu’il y a de plus simple : il est le mix entre un esprit de spectacle aux couleurs béninoises avec celui d’un personnage qui se veut tout ce qu’il y a d’anticonformiste. Et pour rendre le tout intéressant, ce dernier arbore un masque qui est l’élément qui le différencie de tous les autres acteurs. Nous devons ce nouveau venu au label Méko Prod., l’idée étant de faire dans le sensationnel.

À ses débuts, il n’était pas fameux en tant qu’artiste. Pour preuve, ce qu’il proposait frisait l’ineptie et la connerie en termes de fond. Et artistiquement, ce n’était pas mieux. Il se faisait huer et lyncher sur les réseaux. Mais à chaque sortie, Tôgbè Yéton a appris à se nourrir du buzz autour de sa personne pour peaufiner graduellement sa musique. L’équipe autour de l’artiste a aussi le mérite d’avoir l’œil pour le spectacle monté de toutes pièces. Ainsi, le concept Tôgbè Yéton devint peu à peu une attraction incontournable sur les réseaux.

Tôgbè Yéton va au-devant de défis pour asseoir son impact

Les sujets proposés dans sa musique restent propres aux réalités du pays. Il met en avant l’un des dialectes (le vernaculaire) ; fait l’apologie des valeurs endogènes : divinités (gambada, kininnsi...) ; et présente nos réalités quotidiennes sans chercher à les enjoliver. Son approche singulière pour communiquer sur les réseaux a séduit bon nombre. Son impact peut être remis en doute, mais force est de constater que nombreux sont ceux qui ont suivi le délire au point de chercher à le reproduire. Avouons aussi que le personnage reste très productif et a la bonne dose d’humour pour garder en haleine tous ceux qui le suivent. C’est dans cette dynamique qu’il annonce son album intitulé « Ghetto Vi » après seulement un an et demi d’activité dans la musique. Le projet comporte 30 titres, et même si celui-ci est assez redondant par endroit, il a reçu un accueil assez favorable du public.

Pour le lancement, il partage l’affiche lors d’un concert le 23 décembre 2018 au palais des sports du stade Matthieu Kérékou avec Tyaf, qui sortait également son premier album intitulé « Au Sommet ». Le point marquant est qu’il est arrivé à remplir la salle qui fait plus de 6.000 places, alors qu’il ne passe pas en radio. Un exploit qui reste une première pour un artiste urbain de son rang ! A ce stade, on ne pourrait plus ignorer qu’il a un réel impact, et pourrait très bien s’ériger comme le chef de fil de la nouvelle vague de rappeurs utilisant le vernaculaire comme langue, surtout quand on se souvient que ce dialecte a eu de grands noms tels que R-Man (Fô Logozo), Mutant Kokpémédji, Adinon Le Nerveux et bien d’autres qui l’ont vraiment mis en valeur.

Tôgbè Yéton, laxisme et excès de confiance malvenue !!

Le plan de communication de l’artiste reste clair : faire du buzz et du chiffre dans la foulée. Mais reste à savoir combien de temps tout ça va durer quand on sait la vitesse à laquelle le public béninois se lasse. Certaines des stratégies qui ont fait effet dans son plan de communication sont revenues plusieurs fois sans qu’on ait cherché à les actualiser. Tout actuellement donnent l'impression que l'artiste et son staff sont satisfaits du chemin parcouru et qu'ils n'ont clairement pas prévu d'aller au-delà de ce qui a été accompli. La présence de l'artiste sur les réseaux pour alimenter son actualité, qui se faisait sans partage, a à tout point de vu, comme qui dirait, été négligé depuis un moment. On dirait même que le succès de son concert y est pour beaucoup. Un point bien plus marquant est que l'artiste depuis lors faire preuve d'une passivité qui pousse au questionnement. L'année dernière à la même période, il dominait l'actualité sans partage. Mais là, on a droit à l'écho que fait son absence. Oui, on peut comprendre qu'il veuille défendre l'album, mais même sur ce point, il n'en est rien. La promotion pour défendre l’opus a disparu en même temps que lui. Assistons-nous à la fin du concept ? Ou l'artiste et son équipe seraient ils à pied d'œuvre pour revenir plus fort ?

Il ne serait vraiment pas judicieux de stopper une machine qui a gagné en puissance et pourrait même faire mieux. Le silence et le manque d’envie qu’on a pu voir en ce premier trimestre de l’année en cours ne reflète en rien une envie d’aller encore plus loin. L’esprit de conquérant qui caractérisait l’artiste et son staff semble être muselé par l’année extraordinaire qu’ils ont réalisée. Se plaire et se satisfaire de la colline qu’ils ont gravi alors qu’ils détiennent les atouts pour prétendre siéger au sommet de la montagne de l’Afrique de l’Ouest, ou même de l’Afrique, car croyons-le, ils ont actuellement tout pour rêver grand. Nous espérons que ce calme est celui d’avant le déluge et non celui précédant l’arrêt du concept Tôgbè Yéton.

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