On se serait attendu à une prestation moindre qu'on aurait péché : Cdrik Koodjo entre dans la lignée des artistes les plus complets au Bénin. De sa diction à sa recherche de l'émotionnel, de l'innovant, du net plus ultra, il n'y a qu'un pas.
Mais justement, ce jusqu'au-boutisme donnant du punch au clip de "Alo Do Ta" tend vers le péché artistique.
• Un excellent instrumental
Du point de vue de l'instrumental, rien à redire. Tout est concocté de manière à insuffler un coup de boost. On danse, on chante, on rappe et tout ça, sur le même morceau. Ce qui reste encore plus accrochant, c'est l'insertion de pas de danse de chez nous dans la réalisation.
C'est exactement ce genre de musique consensuelle qui pourrait faire notre particularité sur l'échiquier mondial. Ce style artistique (afro-rap) pourrait, si on s'y investit, orienter notre musique vers une nouvelle dimension, un peu comme l'entrée des écureuils à la CAN.
• Cdrik Koodjo se perd ?
S'il y a une chose de remarquable chez lui, c'est son habileté à se coller à chaque style qu'il explore. On l'a dit, il reste un jusqu'au-boutiste pour ce qui relève de la forme de son écriture artistique. Il tente plusieurs tonalités, et chacune semble lui réussir. Mais c’est là le problème.
Explorer une abondance de dimensions : aucun problème, seulement c'est un couteau à double tranchant. D'un côté, cela dénote de son aptitude à jouer sur plusieurs tableaux. Mais sur le second versant, définir sa carrière devient difficile.
Certes, d'un morceau à l'autre, Cdrik Koodjo ne coud pas le même boubou (on répète : c'est louable), mais là où cela représente un danger, c'est qu'on a du mal à le circonscrire. Que fait-il, où va-t-il ? Quelle est sa feuille de route ?
• De l'amalgame dans les scènes
L'envie de pourchasser deux lièvres à la fois s'est traduit dans le clip vidéo de "Alo do ta", notamment à partir de la 87e seconde (01 min 27). On peut encore comprendre la scène où un sorcier jette un sort à la figurante (adan gbo é, le malheur l'a touché) et après, la séquence où la Bible est utilisée révèle la délivrance.
Et ensuite ? Qu'advient-il de la figurante : elle survit, ou elle succombe ? On en sait rien. A la place, la réalisation nous sert un combat à mains nues de Cdrik Koodjo. Pourquoi cette scène ? Elle justifie quoi ? Elle sert à quoi ? Elle nous prouve quoi ?
L'artiste tenait apparemment à insérer plusieurs idées et effets spéciaux dans le même clip. Il en résulte un mélange très peu nourrissant, du haricot au voandzou surmonté d'une pâte de maïs : indigestion. Risque de surmenage gastrique (visuel dans le cas présent).
• On aurait pu…
…procéder autrement pour ce clip, en tout cas mieux travailler l'échelonnement des idées. On aurait pu finir une scène avant d'en aborder une autre. On aurait pu réduire les effets spéciaux et travailler sur la qualité de l'image au naturel. On aurait pu… on aurait pu… mais c'est déjà fait ! Néanmoins, rien ne nous empêche d'apprécier ce clip, surtout l'instrumental en arrière-plan. On aime ses vibes, mais c'est tout.
