La punchline dans le rap béninois et l'afflux de la nigauderie


Interrogez ces rappeurs qui, pêle-mêle, lancent des phrases superflues et qui, de façon balourde, ose à se backer en hurlant par eux-mêmes : « punchline ». Interrogez-les et demandez à ces mc's : « pour qui nous prennent-ils ? ». Mieux, interrogez leurs propres textes, et ne soyez surtout pas hébétés qu’ils vous disent : « Merde ! Ces rappeurs qui nous écrivent, nous emmerdent ! ». Nous ne savons depuis quand et par faute de qui, mais de nos jours, tout rappeur de chez nous, qui écrit une phrase, différente de celles « vides » qu’il écrivait, ose briguer que c’est une « punchline ». Non mais franchement, c’est quoi cette crise ?

Et voilà qu’en lieu et place de textes réfléchis et bien ficelés, d’écrits émotifs et réalistes, nos rappeurs cherchent dans les moindres recoins de leur cervelle, leur soi-disant « punchline », pour remplir nos oreilles de sons sans couilles ni queue. Et quand ils s’émeuvent de leur prétendue performance, il n’y a même pas un seul cancrelat pour rire suffisamment. Parce que ça n’en vaut même pas la peine. Donc oui ! Interrogez nos rappeurs et demandez-leur : Où sont leurs punchlines ? Sont-ce ces oxymores, ces parallélismes, ces calembours, ces assonances, ces allitérations, ou tout simplement, ces figures de style qu’ils dictent ? Non mais, où sont les punchlines ? Nous allons tirer l’affaire au clair !

Le rap béninois semble omettre qu’à l’origine le hip-hop naissait d’un trop-plein d’émotions à déverser, d’un génie diseur à faire entendre, d’une réappropriation du savoir qu’on refusait d’admettre aux « enfants de la street ». Dans cette logique, la punchline intègre une lignée honorifique dans le rap. Et pour ça, il est donc temps que les mots entrent dans leur rôle respectif. Ecrire du rap ce n’est pas juste griffonner quelques bouffonneries, bredouiller des insanités ou bidonner des hérésies venus de on ne sait où. Rapper, ce n’est pas se mettre derrière un micro et rugir d’une rage envers des « haters » qui n’existent peut-être pas ou déferler des envies insolvables. Sans être démagogue, Rapper c’est penser, c’est parler à, c’est apporter, c’est contribuer, c’est faire devenir, c’est améliorer, c’est rêver, c’est faire rêver, c’est créer, c’est émouvoir, c’est tout, sauf du rien. Et la punchline a un impact intemporel, sa fonction est indélébile, sa trace doit être ineffaçable, sa vertu est une énigme à coder, à recoder, à décoder et à démonter. La punchline est la manière du rap de philosopher, de rendre à Socrate ce qui vient du Rap. La punchline est la manière du rap d’exprimer ses représentations scientifiques, de rendre à Einstein ce qui est ancré dans la rue. La punchline est la manière du rap de défendre l’intellect que ceux qui sont à l’extérieur prétendent que les rappeurs n’ont pas.

Alors, si nous n’écrivons que des banalités, des frigidités, des imbécilités, des subtilités désorientées, des phrases creuses, que nous baptisons « punchline », comment voulons-nous que le discrédit, ne soit pas l’étiquette que l’on colle sur le cul de notre rap ? Alors que ce soit clair : la punchline, ce n’est pas de la figure de style. Ça pourrait en être mais pas à priori. La punchline supplante le superficiel et les jeux de mots.

Avis aux rappeurs ! Car de la punchline en veux-tu ? De la punchline, il faut en chercher !

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